Mais quel enFER cette fatigue ! Et qu’il est vulnérable ce sportif ! On le sait exposé à un risque accru de blessures, fractures, infections, surentraînement… Et comme si cela ne suffisait pas il est également sujet aux carences en Fer, aussi appelées carences martiales, et qui peuvent aller jusqu’au stade de l’anémie. Au-delà de l’impact direct sur les performances aérobies, c’est la fatigue ou la fatigabilité à l’effort qui alertera bien souvent le sportif et le conduira à mener l’enquête pour identifier l’origine de son état. Faisons le point sur le sujet avec quelques conseils éclairés pour que vous gardiez une santé de Fer !

Zoom sur le Fer

Le Fer est un oligoélément que l’on retrouve dans l’organisme à hauteur de 50mg par kilo de poids en moyenne, soit un total de 3 à 4g de Fer. Il est apporté par l’alimentation, absorbé au niveau de l’intestin et une fois dans le sang, une partie va être stockée (dans le foie, la rate, les muscles), une autre partie va être utilisée par la moelle osseuse pour la production de globules rouges dont la fonction principale est le transport de l’oxygène dans le sang. En plus petite quantité on retrouvera également le Fer dans des complexes enzymatiques par exemple dans les mitochondries, petites usines intracellulaires qui produisent de l’énergie à partir des glucides et lipides.

Transport et stockage d’oxygène, production d’énergie… sans entrer dans le détail on comprend aisément qu’un déficit en Fer peut avoir des répercussions sur les performances sportives.

Chaque jour l’organisme recycle une partie de son Fer et les pertes sont estimées à 1 à 2 mg de Fer par jour. L’alimentation permet de compenser les pertes en Fer et du fait d’une assimilation très faible au niveau digestif il convient d’apporter au moins 10 fois la quantité perdue soit 10 à 20mg de Fer par jour.

Quels sont les conséquences d’une carence en Fer ?

Si l’alimentation ne permet pas de compenser les pertes ou si ces pertes sont trop importantes (entrainement non adapté, non-respect des phases de récupération, saignements, don de sang, mauvaise assimilation…), un déficit en Fer peut apparaître. Ce déficit aussi faible soit-il peut avoir un impact cliniquement notable puisque le Fer est essentiel dans de nombreuses fonctions. De plus, si le déficit devient durable et trop important, la moelle osseuse ne sera plus en mesure de produire autant de globules rouges faute de matière première, et une anémie (baisse du taux d’hémoglobine) peut apparaître.

On note trois stades d’évolution. La biologie vous permettra de savoir où vous en êtes (fer sérique, ferritine et coefficient de saturation de la transferrine) :

Stade 1 => Diminution des réserves en Fer sans répercussion fonctionnelle

Stade 2 => Réserves en Fer épuisées et altération des processus enzymatiques sans retentissement sur le renouvellement des globules rouges

Stade 3 => Moindre production de globules rouges = anémie

Qui dit manque de Fer, dit donc manque de matière première pour faire fonctionner les usines à énergie (mitochondrie) et donc moindre production d’énergie par les cellules. Et au stade ultime on note une possible diminution de la production de globules rouges et donc une moindre capacité à transporter l’oxygène limitant la aussi la production d’énergie par les cellules.

Le sportif ne mettra pas longtemps à sentir qu’il est fatigué, que ses performances stagnent ou baissent malgré un entrainement adapté ou encore qu’il récupère très mal et présente une fatigabilité anormale à l’effort.

Les symptômes cliniques de la carence en Fer sont divers, non spécifiques si on les considère séparément et retardé dans le temps. On peut noter :

  • Asthénie, fatigabilité anormale
    • Pâleur de la peau, cheveux ternes
    • Dyspnée, palpitations, tachycardies
    • Troubles du comportement

D’autres symptômes peuvent orienter vers le diagnostic de carence martiale:

  • Infections répétées
    • Cheveux cassants
    • Diminution des capacités intellectuelles
    • Réduction des capacités physiques à l’effort, régression ou stagnation malgré un entrainement adapté

Pourquoi le sportif est-il plus à risque ?

Le sportif sollicite beaucoup son organisme. Et cet organisme pour fonctionner à haute intensité sur des efforts de longue durée doit s’adapter mécaniquement et physiologiquement. Et cela n’est jamais sans conséquence. Parmi les mécanismes qui augmentent les pertes en Fer chez le sportif on retrouve :

  • Hémorragie digestive à l’effort

Elles sont provoquées par une moindre irrigation des viscères à l’effort, d’autant plus si l’effort est intense, durable et en présence d’une déshydratation. Le choc des organes ou la prise d’anti-inflammatoires ou aspirine peuvent aggraver le phénomène. Il en résulte une altération de la muqueuse digestive et des saignements occultes. Le sang perdu contient du Fer. Par ailleurs la muqueuse intestinale étant altérée l’assimilation du Fer se fera d’autant plus mal.

  • Hémolyse intravasculaire

A l’effort l’accélération du débit sanguin provoque des turbulences vasculaires. Les globules rouges présents dans les vaisseaux sont fragilisés et peuvent être détruits. Le Fer est libéré et pas totalement recyclé. Les contraintes vasculaires menant à la dégradation de globules rouges sont amplifiées dans les sports avec impact au sol (création d’une onde de choc) ou avec contractions excentriques (muscle qui va « écraser » les vaisseaux). Des membranes cellulaires de mauvaise qualité favorisent ce phénomène d’hémolyse.

  • Hémolyse radicalaire

Ne passons pas à côté du fait que l’activité physique est à l’origine d’un stress oxydant c’est-à-dire de la production de radicaux libres. Ces radicaux libres vont oxyder ce qui se trouve sur leur passage et notamment les lipides constituant les membranes des cellules. Les globules rouges fragilisés peuvent rompre plus facilement libérant la aussi le Fer qu’il contiennent.

  • Perte de Fer par sudation (très faibles)

Que « FER » pour retrouver le peps ?!

Dans la théorie c’est simple ! On confirme la carence en Fer et le stade d’évolution. Puis on identifie les causes afin de les prendre en charge. Les situations pouvant mener à un déficit en Fer sont multiples : règles abondantes, kilométrage excessif, charge d’entrainement, entrainement non adapté, don du sang, troubles digestifs, déficits d’apports, alimentation déséquilibrée, carences en cuivre, inhibiteurs d’absorption, déficit en oméga-3, stress oxydant marqué, inflammation chronique… Ce n’est qu’une fois la cause identifiée et prise en charge que l’on pourra espérer rétablir le déficit de façon durable. Plus le déficit est important et ancien, plus il faudra du temps pour rétablir l’équilibre.

Dans certains cas une supplémentation sera indispensable pour faire remonter les réserves de Fer. D’autant plus que bien souvent le sportif s’impose une alimentation hypocalorique et donc restrictive via laquelle il est difficile d’apporter une quantité de Fer suffisante pour combler le déficit.

Selon le profil et la cause majeure du déficit, plusieurs alternatives seront utiles:

  • Utilisation de probiotiques pour restaurer l’écosystème digestif, préserver la muqueuse et maintenir son bon fonctionnement pour favoriser l’assimilation du Fer
    • Faire une cure d’acides gras poly-insaturés pour moduler l’inflammation (rôle des Omega-3) et augmenter la souplesse des membranes cellulaires dont les globules rouges
    • Utiliser une boisson énergétique adaptée à l’effort pour préserver l’irrigation du tube digestif à l’effort
    • Adapter l’entrainement : diminution du nombre de km, modification du terrain d’entrainement (moins de dénivelé, changement de sol…), augmentation des phases de récupération pour que les phénomènes d’adaptation se mettent en place…
    • Augmenter les apports de Fer dans la ration alimentaire. On retrouve du Fer dans de nombreux aliments. Fer animal (viandes, abats, boudins, poissons…), Fer végétal (pain complet, céréales, petits pois, légumes à feuilles, fruits secs, noisettes…)
    • Débuter une supplémentation en Fer couvrant 100% à 300% des apports nutritionnels conseillés
    • Associer une couverture antioxydante => fruits et légumes frais +/- compléments

Attention aux idées reçues !

Alors tout comme Popeye, une boite d’épinards et ça repart ? NON !!!  Il y a bien du Fer dans les épinards mais le Fer végétal est très mal assimilé… Tout au mieux 3 à 5% de ce que vous ingérez sera réellement absorbé. Quant au Fer animal il est un peu mieux assimilé à hauteur de 20 à 25%. Considérons que nous n’assimilons en moyenne que 10% de ce que contient notre alimentation. L’essentiel est donc d’optimiser cette assimilation que ce soit en ajustant la qualité du Fer ingéré, mais aussi la quantité, sans négliger de préserver tous les systèmes impliqués dans l’assimilation du Fer à commencer par la muqueuse digestive.

La trousse à pharmacie du carencé – les compléments à base de Fer

Avant toute chose pas d’automédication ! Ne jouons pas aux apprentis sorciers car une prise non adaptée de Fer comporte des risques. Une surcharge en Fer ne sera pas sans conséquences et l’objectif d’une prise en charge est bien de combler un déficit et non pas de dépasser les capacités de gestion/stockage de l’organisme.

Si votre médecin juge bon de débuter une cure de Fer, évitez les compléments de 1ère génération qui associent le Fer à des sels (fumarate, chlorure, sulfate…). Ils sont mal assimilés d’une part et sont agressifs pour la muqueuse digestive d’autre part. Le Fer libéré de son sel est pro-oxydant et agresse la muqueuse intestinale. Comme vous en aurez pour 1 à 3 mois minimum, autant préserver votre intestin ! Privilégiez des compléments de Fer chélaté à doses physiologiques pour une meilleure tolérance et meilleure assimilation du Fer.

Pour favoriser l’assimilation du Fer d’origine végétale ou des sels de fer voici quelques conseils supplémentaires :

– La prise du complément de Fer doit se faire idéalement en dehors des repas

– Associer la prise à un verre de Vitamine C (jus d’orange, citron…)

– Eviter la prise concomitante de café, thé, jaunes d’œufs, son, lait, caséine, épinards…

– Pas de régime riche en fibres

– Respecter un intervalle de 2h avec la prise d’autres médicaments notamment certains antibiotiques ou les médicaments topiques gastro intestinaux à distance du Fer

Sur ces bons conseils… N’attendez pas que votre stocks se vident et assurez-vous d’un bon équilibre pour entretenir la machine qui vous portera au bout de vos projets sportifs les plus fous. Et n’oubliez pas les sages paroles de Jacques Prévert : « On a beau avoir une santé de Fer, on finit toujours par rouiller !».

Alexia